LA ROUTE DES OS (Russie)

Une route plutôt sinistre...

Elle est officiellement la route fédérale R-504 mais elle est restée comme étant "la route des os" ou "route des ossements". Se trouvant en Russie orientale, elle relie  Magadan à Nijni Bestiakh, sur plus de 1961 kilomètres. Elle traverse une des zones les plus froides du globe, la température pouvant descendre à -70°. On arrive même à -80° sur les plateaux environnants.

Pourquoi ce nom ?
Il fait référence en fait aux prisonniers des Goulags (camps de travail). Lors des grandes purges staliniennes et des répressions, il y a 90 ans, des milliers de prisonniers furent envoyés sur place pour construire la route en question. Le tout dans des conditions épouvantables, ne serait-ce qu'au niveau du climat : l'été, les marais étaient gorgés d'insectes transmettant des maladies, dans une torpeur moite, poisseuse et l'hiver, les températures devenaient terribles.
Le nom de "route des ossements" vient donc des corps des travailleurs, morts au travail, qu'on enterrait sur place... C'étaient les prisonniers eux-mêmes qui enterraient les corps de leurs compagnons tombés, directement sur le chantier car en raison du sol glacé, il était impossible de creuser des tombes aux alentours. On raconte que la route aurait coûté un mort par mètre construit, on parle de 250 000 morts pendant la construction, de 1932 à 1953. Ils sont tous enterrés là, sous la route. Le but de cette dernière était de relier plus facilement les mines d'or de Kolyma. Ceux qui survécurent à la construction de la route se retrouvèrent donc à travailler dans les mines.


Aujourd'hui, la route est plutôt délabrée, peu entretenue. Des ponts ont été emportés ou se sont effondrés, il y a eu de nombreux glissements de terrain. L'hiver, on traverse les rivières et les étangs gelés. Pendant un temps, l'endroit fût un lieu d'aventure si l'on ose dire pour des aventuriers qui se lançaient le défi de parcourir la route en hiver. En 2019, elle a été partiellement restaurée, elle est à nouveau accessible à des voitures ordinaires mais n'est pas asphaltée sur sa totalité.
Elle reste un endroit isolé, vide, où l'on peut rouler des heures dans la solitude et le silence, sans rencontrer âme qui vive, à travers une des régions les plus inhospitalières de Russie.

La sinistre origine de son nom est restée dans les mémoires et, quelque part, cette route est un vaste cimetière.
Paradoxalement, pour les rares habitants du coin, elle est vitale. Ils n'hésitent donc pas à nommer l'ancienne "route des ossements" la "route de la vie"...