Sans doute le grand classique d'Edgard Allan Poe et une de ses nouvelles les plus fantastiques (au sens premier du terme). Elle date de 1839 et a été traduite en français par Charles Baudelaire lui-même.
Le héros (dont on ignore l'identité) est invité à la maison de son ami Roderick Usher, ayant reçu de lui une lettre dans laquelle il se dit souffrant et réclamant sa présence. En fait de maladie, Usher semble souffrir d'une hyper-acuité des sens et d'une grande anxiété. Sa sœur jumelle, Madeline, est elle aussi malade, tombant dans des états de transe cataleptique.
Roderick soutient alors à son ami que la maison est "vivante", dotée de sens, ce qui proviendrait de la façon dont la maçonnerie est entremêlée à la végétation entourant le bâtiment. Plus tard, il lui annonce que Madeline est décédée et qu'il a l'intention de conserver son corps durant 15 jours dans un caveau en attendant de procéder à l'enterrement définitif. Après avoir aidé son ami dans cette tâche, le narrateur constate une aggravation rapide de l'état de Roderick.
Une semaine plus tard environ, le narrateur reçoit, par une nuit de tempête, la visite de Roderick, plus perturbé que jamais. Il tente de l'apaiser mais Roderick devient finalement hystérique et clame que les bruits qu'il entend dans sa maison sont causés par sa sœur qu'ils ont en fait enterrée vivante et qu'il le sait depuis plusieurs jours. La porte de la chambre s'ouvre alors violemment et laisse apparaître Madeline, en sang et dans son linceul. Elle avance vers son frère et lui tombe dessus comme elle rend le dernier soupir alors que lui-même succombe à sa frayeur. Le narrateur terrifié fuit alors la maison et, à la lueur d'un éclair, voit la fissure parcourant la maison s'élargir, causant l'écroulement du bâtiment tout entier.
Que dire de cette oeuvre devenue culte ? On est saisi par la force incroyable qui s'en dégage, cette atmosphère malsaine, cette sourde tension et cette ambiance de peur, de hantise. Mais aussi par le côté psychologique du récit avec cet homme aux sens et perceptions ultra-développées, cet hypocondriaque qui devient vraiment malade à force de le croire. Poe nous offre une plongée en apnée dans l'auto-suggestion et les profondeurs du psychisme humain. Sans oublier le lien particulier, ambigu et parfois dérangeant, qui unit Roderick à sa soeur jumelle.
Et puis bien sûr, la maison, personnage central du livre, "vivante", omniprésente... Une maison à l'image de ceux qui l'habitent et qui souffre et agonise en même temps qu'eux et finalement meurt avec eux, son écroulement étant en fait celui de la famille Usher. D'ailleurs, on peut s'interroger sur le double sens du mot maison : le bâtiment et aussi la famille (on parlait autrefois de la maison d'un gentilhomme pour désigner sa famille, son entourage).
Une histoire incroyable, d'une modernité étonnante, devenue un classique intemporel.
La chute de la maison Usher a depuis connu de nombreuses versions, au cinéma, au théâtre, à l'opéra et même en scénario de jeux de rôle.
A lire, absolument.