Le château des femmes
Ce sont bien les femmes qui ont jalonné l'histoire du château de Chenonceau.
La première est Catherine de Briçonnet :
De petite noblesse, épouse du contrôleur général des finances, c'est elle qui fait édifier le château en 1513. Elle ne se contente pas d'en décider la construction, elle examine soigneusement les plans, décide, rectifie, choisit les formes, le décor, les détails... C'est vraiment son château, tel qu'elle l'a voulu. Ses initiales, entrelacées avec celles de son mari, se retrouvent dans beaucoup de pièces, sculptées dans le bois ou la pierre.
Diane de Poitiers est le grand amour de Henri II, fils de François Ier :
Elle a vingt ans de plus que lui, elle arrive à un âge où l'on est vieux à l'époque, mais elle reste d'une beauté et d'une fraîcheur sans égal. La belle a, il est vrai, des pratiques inhabituelles pour l'époque : levée très tôt, elle fait une grande promenade à cheval ou à pied, prend un bain froid et retourne se reposer. Elle fait attention à son alimentation, pratique de l'exercice, néglige le maquillage... Le roi, bien que marié à Catherine de Médicis, est fou d'elle. Il la comble de présents dont Chenonceau. Mécène et femme de grand goût, Diane va enrichir le château de quantité d'oeuvres d'art. C'est elle qui fait édifier le fameux pont reliant le château à la rive gauche du fleuve. Elle se préoccupe beaucoup des jardins également.
Catherine de Médicis prend sa revanche à la mort du roi, qu'elle a pourtant toujours tendrement aimé (Elle ne s'habillera plus qu'en noir jusqu'à la fin de sa vie) :
Henri II meurt suite à un accident de tournoi au cours duquel la lance de son adversaire lui a transpercé l'oeil. Si Catherine, devenue régente, décide de laisser Diane tranquille, elle lui reprend Chenonceau.
La redoutable Catherine de Médicis était aussi femme de goût. Elle a le coup de foudre pour Chenonceau, elle l'embellit, l'agrandit, l'orne de nouveaux jardins et y donne des fêtes fastueuses. C'est sous son impulsion que le bâtiment acquiert sa forme définitive. La Reine-Mère ira jusqu'à emprunter et s'endetter pour financer les travaux de ce château qu'elle adore.
Louise de Lorraine est la dernière souveraine de Chenonceau :
Elle en hérite à la mort de son époux, le roi Henri III. Un époux qu'elle adorait et dont la mort la laisse désemparée. La royale veuve se retire alors au château et devient "la dame blanche de Chenonceau". C'est pourtant le noir qui domine alors : les miroirs sont voilés, des tentures noires déployées partout, les murs peints en noir... Cette décoration funèbre survivra à la reine inconsolable et demeurera en place pendant un siècle.
Louise Dupin, mariée à un noble de haut rang, va quant à elle, sauver le château des pillages de la Révolution :
Femme d'une grande beauté, cultivée et mécène, elle tombe sous le charme de Chenonceau qui lui revient. C'est elle qui fait disparaître le décor funèbre voulu par Louise de Lorraine. Profondément marquée à son tour par les morts successives de son mari, de son fils et de son petit-fils, Louise Dupin s'installe définitivement au château en 1792 à l'orée de la soixantaine. Très aimée des villageois, elle réussit à éviter (En partie) le pillage du château, sauve des toiles de maître, des bijoux et les archives du lieu. En 1795, la Révolution tente de récupérer le bâtiment et le domaine mais Louise Dupin se défend si bien en justice qu'elle obtient gain de cause et peut conserver son domaine. Elle meurt à 93 ans, au château, et repose dans la forêt du domaine, suivant ces dernières volontés.
Enfin, impossible de ne pas mentionner Madame de Pélouze :
Héritière d'une énorme fortune, elle tombe sous le charme du château (Passablement délabré) en 1865 et entreprend de le restaurer entièrement en une campagne de travaux qui devait durer cinq ans et coûter plus d'un million et demi de francs-or de l'époque. Un véritable chambardement (Certains parlent de mutilation), mais qui sauve le bâtiment de la ruine. Comme Catherine de Médicis, Madame de Pélouze donne à Chenonceau des fêtes somptueuses et comme Catherine de Médicis, elle finit par s'endetter et emprunter pour pouvoir achever les travaux qui ne seront terminés qu'en 1878. Compromis dans un scandale financier, son frère perd toute sa fortune et doit hypotéquer le château.
Chenonceau, une histoire de femmes...