MAISONS DE THE/CAFES DU MONDE

Je pense même que Budapest cherchait à rivaliser avec Paris carrément et à devenir le Paris de l'Europe de l'Est. Certains quartiers ont un côté presque Haussmanien avec de grandes et larges avenues, des immeubles prestigieux et des cafés, des grands magasins… Avec ce style éclectique qu'on retrouve déjà sous le Second Empire où l'on mêle un peu de tout assorti d'un côté "revival" de certaines périodes.

Après, entièrement d'accord : c'est bien plus lourd et clinquant que le style viennois, plus léger, plus mousseux et plus frivole, je dirais. De ce que j'ai gardé de mon passage à Vienne, j'ai le souvenir d'un style chargé mais qui reste quand-même léger quelque part, mousseux, lumineux… Qui exprime une certaine insouciance, une certaine joie de vivre.
Ce qui ne m'empêche pas d'avoir trouvé Budapest très belle.

Pour l'expérience de ton parent Astre, je pense que malheureusement, dans un tel endroit, ça doit finir par être un peu l'usine si je puis dire. Et puis bon, tu paies certainement plus le décor que ton café...

Nous reprenons notre tour du monde des cafés et maisons de thé.
Nous voici aujourd'hui à Rio de Janeiro, au :






L'établissement date de 1894, fondé par des immigrants portugais, Joaquim Borges de Meireles et Manuel José Lebrão. En plein coeur de la "Cité merveilleuse", l'endroit est un bijou d'architecture et de décoration de la Belle Epoque. En 1912, des travaux de rénovation lui ajoutent une touche Art Nouveau, on y installe de grands miroirs non pas en verre mais en cristal, spécialement fabriqués à Anvers. Les boiseries, en bois de jacaranda, sont créées spécialement pour la maison. Le marbre des guéridons vient d'ItalieEn 1922, un salon de thé est installé. L'endroit devient le rendez-vous de tous les artistes et intellectuels de la ville.



Au coeur d'un quartier encore pittoresque, l'endroit offre une remontée dans le temps, ne serait-ce qu'avec son ascenseur d'époque, toujours en fonction, avec liftier s'il vous plaît, pris d'assaut par les touristes. On peut y boire un verre, un café ou un thé, déguster une pâtisserie ou autre (essayez le fromage à la goyave, si, si, ça existe! Je n'ai pas du tout aimé à l'époque, je vous conseille plutôt un brigadeiro, une tuerie au chocolat), y manger (à table ou au buffet). Les serveurs sont en cravate et tablier, comme dans une brasserie.

Pour manger, je vous conseille vraiment le buffet : beaucoup plus rapide et moins formel. Si vous ne parlez ni anglais ni portugais, montrez simplement ce que vous voulez dans la vitrine. On vous sert sur une assiette et vous allez vous installer où vous voulez pour manger, certains mangent même debout en bavardant. A l'étage, vous pourrez admirer la magnifique verrière :





Soyons francs, si vous cherchez une cuisine authentique, traditionnelle, vous trouverez mieux et moins cher à Rio (j'ai quand-même trouvé les pâtisseries très bonnes, moi qui n'aime pas le sucré en général). Mais le décor... Une pause dans un superbe décor 1900, sous les tropiques, c'est à voir ! Par contre, comme tous les établissements dans son genre, prix élevés, beaucoup de monde, beaucoup de touristes, c'est bruyant et animé, vous n'y serez pas au calme. Mais bon, où avez-vous vu que Rio était une ville calme ? Attention, quand c'est bondé, il peut vite faire très chaud à l'intérieur, surtout en été. Lors de mon passage, à l'époque, il y avaient des ventilateurs fixés aux murs, ce qui cassait un peu l'atmosphère quand-même.



Si vraiment vous êtes gêné par le bruit ou la foule, vous pouvez vous rabattre sur la succursale de Copacabana. Vous y trouverez les mêmes produits, le décor en moins. Par contre, vous aurez droit à une magnifique terrasse près du fort de Copacabana avec une vue à couper le souffle sur la baie...

Magnifique. J'adore ce genre d'endroit pour la décoration : pour moi c'est l'évasion. Un côté hors du temps. Merci pour cette découverte. Excellente idée d'avoir mis aussi des photos en n et b.

Un air de brasserie 1900 en plein Rio...
Le lieu est d'autant plus surprenant que, de l'extérieur, on n'imagine pas vraiment que l'établissement est aussi "profond", aussi vaste. L'endroit est assez sombre aussi, très peu de fenêtres (la devanture au rez-de chaussée et de mémoire, deux grandes fenêtres à l'étage) : du coup, il est quasiment toujours éclairé et la lumière jouant avec les boiseries et les grands miroirs en cristal renforce le charme du lieu.

J'y suis allé deux fois. A mon premier passage, c'était en pleine heure de pointe et c'est vrai que c'est bondé, bruyant, affairé et on entend plus parler anglais, espagnol et allemand que portugais... J'ai mangé mon gâteau perché sur un tabouret, dans un coin après avoir fait la queue un petit moment.
La deuxième fois, j'y suis allé pour le petit-déjeuner, tôt le matin et là, c'était vraiment tranquille. Peu de monde et on y entendait majoritairement du portugais. Là, j'ai pu m'asseoir et vraiment profiter du lieu.

Le quartier, Centro, est agréable, de classe moyenne, avec pas mal de monuments historiques comme le théâtre municipal (très kitch, sorte de Palais Garnier brésilien, à voir) ou la bibliothèque nationale. On y trouve des petites places et des marchés, des cafés...
Attention, l'établissement est parfois loué pour des mariages ou des séminaires, il est toujours bon de se renseigner avant.

Après Rio et le Brésil, direction l'Argentine et Buenos Aires pour une pause à la Confiteria Ideal.

Cet établissement a été inauguré en 1912, à l'époque où la capitale argentine était "le Paris de l'Amérique du Sud". Le décor voulu par Manuel Rosendo Fernandez, entrepreneur espagnol, est donc celui d'un café parisien de la Belle Epoque. Tous les matériaux ont été importés de France et on y trouve vitraux, miroirs, rosaces, marbres et fleur de lys, devenue emblème de la maison.
Deux niveaux : le rez de chaussée est un café, le premier étage est conçu pour danser le tango, une des spécialités de l'endroit, comme nous allons le voir.

Au début, ce furent principalement des ouvriers, des travailleurs et surtout des femmes (ouvrières, secrétaires, opératrices téléphoniques...) qui fréquentaient la maison et s'y retrouvaient toutes ensemble, pour l'anniversaire de l'une d'elles ou une fête :



Très vite cependant, le lieu devînt le rendez-vous des artistes, écrivains et intellectuels de la capitale, la bourgeoisie et les élégants s'y pressèrent. Dans les années 1920 à 1940, l'établissement était incontournable. A tel point qu'il restait ouvert 24h/24, avec pas moins de 48 employés qui se relayaient en trois services. A partir de 1933, la Confiteria édita même son propre journal, qui informait les clients des évènements et soirées du lieu. On se pressait le soir pour danser le tango au premier ou regarder les couples évoluer entre les tables au son de l'orchestre. Sans doute les anciens se disaient-ils que les temps avaient changé depuis l'époque où le tango était réservé aux hommes et se dansait entre hommes uniquement... Dans les années 1940/1950, Evita Peron se faisait livrer au palais présidentiel, chaque jour, des pâtisseries ou biscuits de la Confiteria pour le déjeuner.


Progressivement délaissée et en mauvais état, la Confiteria a été sérieusement reprise en main par l'état argentin en 2003 et proclamée "Patrimoine historique" :



Rénovée de fond en comble, elle a depuis retrouvé son décor et un nouvel éclat :





Soyons francs : on peut y boire un verre et y manger mais si ça reste correct, vous trouverez certainement mieux et moins cher dans la capitale. On vient ici pour le cadre, pour le décor, pour une plongée dans le passé. Et pour le Tango : tous les soirs, au premier, on danse. Tous les amateurs comme les professionnels se donnent rendez-vous ici, dans un décor d'époque, pour passer la soirée à évoluer entre les tables. Vous ne savez pas danser le Tango ? Des cours sont improvisés, des professeurs sont présents pour guider vos premiers pas. Danseurs amateurs, débutants ou chevronnés, tout le monde en piste ! Les soirées les plus réputées ont lieu le jeudi.





On s'en doute, l'endroit est donc très touristique et souvent blindé. Il n'en reste pas moins que le décor d'époque et l'atmosphère un peu surannée, les couples qui font un effort pour s'habiller (costume et souliers cirés pour les hommes, jolies robes et escarpins pour les femmes) ont bien du charme. Parmi les visiteurs de marque contemporains : Diego Maradona, Yoko Ono ou Charlie Watts, batteur des Stones, qui y prît la pose en 2016 :



Ne ratez pas, à l'entrée, les photos d'époque exposées, pour avoir une idée de l'établissement durant sa période de gloire.
Attention, se renseigner avant d'y aller peut être utile : l'endroit est parfois réservé pour tourner des clips ou des scènes de films ou séries.

Direction la capitale autrichienne où les cafés font partie de l'art de vivre.

Nous voici donc au Café Central.
Il a ouvert ses portes en 1876 pour rapidement devenir un haut-lieu de rencontre de tous les intellectuels et artistes de la capitale. Freud, Egon Schiele, Kafka et de nombreux écrivains s'y sont attablés. De même que Trotski, Staline ou un certain Adolf Hitler qui y a prononcé certains de ses discours... Trotski et Staline, lors de leurs passages à Vienne, y avaient leurs habitudes.
Jusqu'en 1938, l'endroit était nommé "L'école des échecs" car chaque soir, de nombreux passionnés et joueurs s'y retrouvaient pour jouer. Le Cercle des Positivistes (un courant philosophique) s'y réunissait également fréquemment. Fermé après la Seconde Guerre Mondiale, endommagé, l'endroit est restauré et rouvert en 1975, rénové à nouveau en 1986.








Le Café Central est inclus dans un immeuble ancien, le palais Ferstel, qui date de 1860, abritait une banque et sert aujourd'hui de lieu de congrès. On peut y accéder depuis le café par une porte spécifique.






Endroit plutôt chic (mais pas hors de prix pour autant d'après ce que j'ai lu ici et là), avec colonnes en marbre, fresques et chandeliers, hauteur sous plafond impressionnante, personnel stylé réputé pour sa courtoisie et sa gentillesse mais, vous vous en doutez, blindé à mort... Il faut être patient semble-t-il. Mais ça reste un des plus fameux cafés de Vienne. Les pâtisseries y sont très réputées dont la tarte maison, mélange savoureux de chocolat et de pâte d’amandes avec un subtil arôme d’orange amère... Vous pourrez la déguster sous le regard de l'impératrice Sissi et de son époux dont deux immenses portraits sont fixés aux murs... En fin d'après-midi, piano et musiciens. Des journaux sont également à votre disposition.
Et surtout, vous êtes à Vienne, où les cafés sont un art de vivre : on s'y retrouve, on y lit, on y joue aux échecs, on y paresse, surtout quand il fait froid dehors. Donc, une fois assis, vous pouvez rester un bon moment, même votre consommation terminée, sans que l'on vous dérange ou qu'on vous demande si vous voulez autre chose (ou qu'on vous fasse comprendre de laisser la place à ceux qui attendent !).

Très tentant...

Une institution de la capitale hongroise. L'impératrice Sissi, amoureuse de la Hongrie, y avait ses habitudes, Franz Liszt aussi.



L'endroit, installé dans un superbe bâtiment, date de 1858. Dès le départ, il est réputé pour ses pâtisseries et fait office de maison de thé, café et pâtisserie auprès de toute la haute société et des voyageurs qui s'y bousculent. Un endroit feutré, lumineux et confortable, agrémenté de plusieurs pièces dont un salon orné d'un tableau de Gustave Moreau.





Vous vous en doutez : touristique à mort et des prix à la hauteur du lieu. Mais c'est une institution de Budapest, j'y suis passé il y a bien longtemps et j'en garde un bon souvenir (l'endroit m'avait paru très lumineux, avec ses grandes et hautes fenêtres). Ambiance confortable et, si vous venez tôt le matin avant les hordes de touristes, vous pourrez avoir l'impression de déguster votre chocolat, votre thé ou votre café, accompagné d'une pâtisserie, dans une délicieuse ambiance "mid-Europa". Certaines pâtisseries sont des recettes originales, créées par le maître des lieux à l'époque.

L'incontournable de la maison ? Le Gerbeaud Emil Öröksége, gâteau au chocolat et aux cerises, au cognac, et accompagné d'une langue de chat au chocolat craquant. Me demandez pas si c'est bon, je déteste les cerises et le cognac, j'ai donc passé mon tour. Vous pourrez vous rabattre sur le Gerbeaud, pâte brisée recouverte d'un glaçage au chocolat, fourré de confiture, de noix râpées et de morceaux de pomme.
Vous pourrez également acheter à emporter, comme certains souverains d'Europe de l'Est qui, autrefois, faisaient venir leurs biscuits de la maison Gerbeaud. A l'époque, les clients étaient servis sur des plateaux d'argent et les boîtes en velours contenant les pâtisseries à emporter étaient faites sur mesure pour chaque pâtisserie... Les pralines et les macarons sont réputés. Si vous êtes un peu serré niveau budget, à emporter, vous paierez moitié prix.

Mais il serait vraiment dommage de ne pas se laisser tomber sur une des confortables chaises (marquées du nom de l'établissement) devant une table de marbre afin de déguster une douceur hongroise dans un cadre superbe.
Par contre, si vous êtes au régime... Fuyez !