Nous avons vu avec le sujet de Gorak sur le Colisée les combats de gladiateurs et d'animaux sauvages.
Avec le Circus Maximus, voyons de plus près l'autre grande passion des romains : les courses.
Le Circus Maximus de Rome fût le plus grand hippodrome jamais construit à l'époque, d'une capacité totale de 380 000 spectateurs. D'abord pourvu de gradins de bois, il fût entièrement en pierre et marbre sous le règne de Claude. Ses dimensions sont impressionnantes : 600 mètres de long, 200 de large, trois étages d'arcades. La structure était fermée à une extrémité par les écuries d'où partaient les attelages et à l'autre par un arc de triomphe dédié à Vespasien. Les gradins n'étaient interrompus que par deux loges, dont le
pulvinar, réservé à l'empereur et sa suite. Cet ensemble majestueux occupait une vallée entière située entre les collines du Palatin et de l'Aventin.
Le centre de la piste était occupé par la
spina, une longue structure en maçonnerie allongée de 344 mètres ornée d'autels, de bassins, de jets d'eau, de statues et, en son centre, d'un obélisque ramené d'Egypte par Auguste et symbolisant le soleil. Les équipages prenaient place dans les
carceres, les écuries qui occupaient une des extrémités du Cirque, puis les portes s'ouvraient et, sous les rugissements de la foule, les chars gagnaient la ligne de départ. Dans une des deux loges s'avançait alors l'organisateur des festivités, tenant un large morceau d'étoffe à bout de bras. Une fois lâché, c'était le départ.
Les
auriges (conducteurs de chars) devaient exécuter sept tours pour un parcours de trois kilomètres environ. Les virages étaient extrêmement dangereux et difficiles à négocier, souvent source d'accidents mortels.
Ce que l'on oublie souvent, c'est que ces courses avaient (du moins au début) un aspect sacré et symbolique très fort :
- Tout d'abord, la course était précédée par une procession solennelle où les statues des dieux, montées sur des chars fleuris, parcouraient la piste à trois reprises dans un nuage d'encens, escortées par prêtres et prêtresses, musiciens et saltimbanques.
- Les concurrents formaient en fait quatre équipes (les
factiones) :
1) les bleus (l'automne et l'eau)
2) les verts (le printemps et la terre)
3) les rouges (l'été et le feu)
4) les blancs (l'hiver et l'air)
Chaque équipe symbolisait donc une des quatre saisons et un des quatre éléments.
- Les écuries de départ, au nombre de 12, symbolisaient les 12 mois de l'année du calendrier Julien et les 12 constellations.
- Les attelages faisaient sept fois le tour de la spina pour symboliser les sept jours de la semaine, mais également la révolution des sept planètes connues alors autour de l'obélisque symbolisant le soleil.
- Chaque tour était compté par un oeuf de bronze en référence à l'oeuf tombé du ciel pour désigner Delphes comme centre de l'univers (Plus tard, le compte-tour sera un ensemble de sept dauphins de bronze montés sur un portique et que l'on faisait basculer à chaque tour).
Il y avait plusieurs courses dans la journée lors des festivités et elles déchaînaient passions et paris, chacune des quatre équipes ayant ses supporters (agitant souvent un tissu de la couleur de son équipe) et cela pouvait dégénérer en émeutes à la fin des festivités. Le peuple avait tendance à soutenir les verts alors que la noblesse et l'empereur soutenaient traditionellement les bleus. En général, on utilisait des
quadriges, chars à quatre chevaux. Postés le long de la piste ou en haut de la spina, les employés des différentes équipes encouragaient leur champion et balancaient parfois un baquet d'eau sur leur passage pour rafraîchir leur attelage.
Contrairement aux idées reçues, les chars n'étaient pas les lourds chars ornementés que l'on voit dans les films. Ils étaient réduits au minimum, sans suspensions et très légers, plus proches de la caisse à savon qu'autre chose. Et surtout, les cochers ne tenaient pas les rênes dans leur main mais les enroulaient autour de leur taille. C'est en se penchant à droite et à gauche, en avant et en arrière, qu'ils dirigeaient leurs montures. En cas d'accident, il fallait trancher immédiatement les rênes avec un petit poignard destiné à cet office et porté à la ceinture pour ne pas être entraîné dans la chute. On peut en avoir une idée plus précise avec ce bas-relief :
Le vainqueur faisait un tour de piste sous les acclamations et les ovations avant de quitter le Cirque par l'arc de triomphe de l'extrémité Est. Pendant ce temps, plus discrètement, les employés rejoignaient la piste par les entrées internes qui la bordaient pour "nettoyer" les dégâts occasionnés par les chutes et accidents...
Les
auriges vainqueurs étaient de véritables stars et pouvaient accumuler un confortable magot, voir même une petite fortune. Les organisateurs des jeux étaient prêts à payer très cher les meilleurs pour s'assurer des courses de qualité et donc les faveurs du peuple. On vendait, comme pour les gladiateurs les plus célèbres, des produits dérivés de ces champions tels que lampes à huile ou médaillons à leur effigie et même de petits flacons de leur sueur, réputée aphrodisiaque...
Aujourd'hui, à Rome, il ne reste que quelques ruines de cette immense structure autour d'un vaste espace envahi par la végétation et où les romains vont promener leur chien ou faire leur jogging.