L'AMBRE

On commence par ma "pierre" préférée. Effectivement, les guillemets s'imposent car l'ambre est en fait une résine fossile sécrétée par des conifères. Bien que non minéralisé, il est parfois utilisé comme une gemme. Son nom provient de l'arabe "anbar", mais le mot désignait primitivement l'ambre gris (qui est lui une concrétion intestinale du cachalot utilisée en parfumerie).
L'ambre a été utilisé par nombre de peuples et de civilisations, principalement dans les parures. On a souvent retrouvé des insectes ou des végétaux pris dans l'ambre et préservés ( le musée de Palanga (Lituanie) possède par exemple une pièce d'ambre contenant un lézard entier).
Du coup, les égyptiens pharaoniques l'associaient à la jeunesse éternelle. Les Slaves ont associé l'ambre aux larmes pétrifiées des dieux. Il servait de talisman de protection, en particulier contre les enlèvements d'enfants. Il symbolisait aussi le lien éternel du mariage.
L'ambre le plus connu est celui de la Baltique.
L'ambre, dédié par les grecs à Apollon, passe pour réchauffer le cœur et transmettre l'énergie solaire. Un collier d'ambre possèderait ainsi le pouvoir de réchauffer et l'on en mettait au cou des jeunes enfants. Un collier d'ambre soulagerait également les douleurs des bébés lors de la poussée dentaire. Il permettrait également de protéger les voies respiratoires, d'éviter angines et maux de gorge ainsi que les saignements de nez.
L'ambre en poudre aiderait à lutter contre la dépression et l'angoisse.
Mais l'un des attraits premiers de l'ambre reste bel et bien cette fameuse couleur "miel" qui se décline en d'infinies possibilités...

L'ambre me fascine également. Je voulais simplement mettre en garde contre les fausses pierres d'ambre qu'on pouvait trouver sur ebay ou autre. Généralement manufacturées en série en Chine, ces fausses ambres sont très grosses allant jusqu'à renfermer de magnifiques libellules ! Ben voyons. On nous prend vraiment pour des gogos, surtout quand on voit en vente plusieurs pierres géantes avec la même photo. Parfois il est précisé "copie" ou "reproduction", parfois non. Sur les fossiles, c'est un peu moins grotesque mais il faut se méfier quand même.

L'ambre à la folie. Ou à l'écoeurement... La Chambre d'ambre est une pièce aux murs recouverts d’éléments sculptés dans de l'ambre authentique au palais Catherine à Tsarskoïe Selo près de Saint-Pétersbourg. 55 mètres carrés pour plus de six tonnes d'ambre... Volée par les nazis en 1941, elle est considérée comme perdue depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Une reconstitution à l'identique a été inaugurée en 2003 après presque trente années de travaux et donne une idée de l'originale.

Cette dernière fût réalisée au XVIIIème siècle par trois maîtres de la marqueterie qui tapissèrent les murs de la pièce avec des lambris taillés dans l'ambre pur, sous la direction d'un architecte. 565 candélabres d'or, une fois allumés, illuminaient l'ambre de reflets féériques, faisant de l'endroit pour les contemporains "la huitième merveille du monde".
En 1941, les russes évacuent en urgence tous les trésors de la ville devant l'arrivée des nazis, mais la chambre est intransportable. Les allemands s'en emparent et la démontent en 36 heures avant de la transférer en 27 caisses sous haute escorte dans un château en Allemagne. C'est là que les panneaux ont disparu, soit cachés en un autre lieu devant l'avance des Alliés cette fois ou brûlés dans l'incendie du château. Parmi les hypothèses les plus folles, des témoignages d'époque faisant état du trésor dans des caisses en partance sur le quai d'une gare ou embarqués à bord d'un navire... On parle beaucoup également d'un passage souterrain découvert depuis peu sous le château où était conservé le trésor et par où il aurait été évacué...
Aujourd'hui encore, de nombreux chasseurs de trésors sont toujours à la recherche des panneaux d'ambre de la mystérieuse chambre...

A noter qu'un film, L'énigme de la chambre d'ambre, est sorti en 2014.

En grec ancien, « ambre » se dit ἤλεκτρον (êlectron).

En frottant de l'ambre, on crée de l'électricité statique (propriété de triboélectricité, pour faire pédant). C'est donc logiquement qu'il a donné la racine des mots « électron », « électrique », …

Incroyable cette chambre d'ambre, de loin on pourrait même croire que c'est de l'or. J'aime bien cette couleur "miel", cette pierre est fascinante. Surtout celles qui renferment des insectes et des végétaux de l'ère préhistorique, quand on pense l'âge qu'elles ont...

Certains trouveront sans doute cette chambre d'or trop surchargée, personnellement j'aime beaucoup ce coté grandiloquent et cette folie dans la création. Elle a malheureusement sans doute été détruite pendant la seconde guerre mondiale. Victime de la folie des hommes dans sa destruction, elle est née également dans une certaine folie créatrice de démesure et de faste.

Les images trouvées sur le net sont assez baroques et incroyables... Sous une certaine lumière ou quand les bougies sont allumées, les reflets chatoyant sur les différentes nuances de l'ambre doivent donner un aspect féérique, onirique même. Surtout qu'on rajouta plus tard des miroirs se renvoyant leurs reflets les uns les autres...
Il a fallu 60 ans (!) pour la mettre en place à l'époque. Ce fût un présent du roi de Prusse aux Tsars de Russie.
La valeur de l'originale est estimée à plus de 150 millions de dollars. On a aucune preuve formelle que les panneaux aient été détruits dans l'incendie qui consuma le château où ils avaient été transférés. D'où les suppositions les plus folles...

Plus proche de nous et plus modeste (Si l'on peut dire), l'oeuvre de l'artiste Lucjan Myrta, le maître de l'ambre polonais. Fou de cette pierre, il la taille, la sculpte et la modèle avec passion. Sa pièce maîtresse est Le coffre au trésor :


825 kilos d'ambre et 12 ans de travail pour ce coffre qui est inspiré du serre-bijoux de Marie-Antoinette qui trône dans la chambre de la souveraine à Versailles.

Ses créations sont d'un raffinement et d'une minutie assez incroyable :


(Photo de/by PolishArtworld.com and Myrta-Lucjan.blog.onet.pl)

Retour à la fameuse "chambre d'ambre" vue plus haut... Après une vue générale, quelques détails de l'ensemble :







L'ambre... à la folie !

Quand c'est surchargé comme cela, l'ambre me laisse de ... marbre.

C'est fou ce truc !
Je voulais le voir, c'était l'occasion ou jamais. Faut pas hésiter à se taper la trentaine de kilomètres depuis Saint-Pétersbourg pour rejoindre Tsarskoïe Selo.

Déjà, l'endroit est superbe, pas étonnant que les Tzars et les grandes familles russes en aient fait leur lieu de villégiature estivale autrefois. La campagne alentours est vraiment agréable, avec ici et là de petits pavillons d'été enfouis dans la végétation ou de petits palais pleins de grâce et de beauté comme le Palais de la Réserve mais aussi des étangs, des pièces d'eau... Il faut se promener à Tsarskoïe Selo pour vraiment réaliser combien les élites russes vivaient dans un autre monde, dans une douceur et un art de vivre inimaginables pour le commun.

Et puis, le Palais Catherine bien sûr, palais d'été de Catherine II, quand-même massacré et quasiment détruit pendant la Seconde Guerre Mondiale, magnifiquement reconstruit et rénové :


L'intérieur par contre est vraiment "trop" niveau surcharge, ça fait franchement mal aux yeux...

Et donc, cette chambre d'ambre (parmi tant d'autres choses). Les jeux de lumière sont incroyables, on a l'impression par moments de voir les murs s'animer, frémir dans la lumière. Les miroirs semblent démultiplier la pièce sous certains angles. Et les détails, la minutie incroyable… Fou et à voir. A admirer aussi, le parquet de la pièce, magnifique.

Un bijou inattendu de la dernière reine de France.
Un médaillon d'ambre dans lequel est pris une araignée. La reine le considérait comme un porte-bonheur. Sous la Révolution, elle l'offrît à Madame De Tourzel, la gouvernante des enfants royaux, à la prison du Temple, pour la remercier de sa fidélité et de son dévouement.



"Madame, autrefois j'ai confié mes enfants à l'amitié, aujourd'hui je les confie à la vertu". C'est par ces mots que Marie-Antoinette nomma madame de Tourzel gouvernante de ses enfants en 1789. Elle remplaçait madame de Polignac, amie de la reine, qui avait fui à l'étranger. La brave Tourzel avait déjà eu sa part de malheur : lors d'une chasse royale en 1786, son mari, tombé de cheval et traîné par ce dernier, s'était brisé le crâne sous les yeux du roi avant de mettre huit jours à mourir. Depuis, sa veuve se consacrait à leurs enfants.


Madame de Tourzel servira fidèlement ses maîtres, sera avec eux lors de la fuite à Varennes et les suivra un moment à la prison du Temple. Transférée dans une autre prison, elle échappera de peu aux Massacres de Septembre et sera sauvée par un ami, monsieur Hardy, qui sauvera également sa fille, Pauline. Elle meurt en 1832, à 82 ans.

Le médaillon est exposé au château d'Ainay le Vieil avec une petite boîte à musique ornée d'une lyre en or, autre cadeau de Marie-Antoinette à la fidèle gouvernante.

Un singulier bijou, l'ambre étant vraiment à part parmi les pierres précieuses. Ici avec cette araignée prisonnière (d'habitude, c'est elle qui emprisonne ses proies), et le côté historique, on a des ingrédients romanesques pour enflammer l'imagination.