THE BREAKERS

Nous poursuivons notre visite des grandes maisons du Gilded Age américain.
Nous voici dans le Rhode Island, à Newport exactement, là où les élites de l'époque partaient en villégiature au bord de l'océan.








"Les brisants", nommée ainsi en raison des vagues de l'Atlantique venant se briser sur les rochers, a été construite entre 1893 et 1895 pour le couple Vanderbilt, Cornélius et Alice.
De style extérieur "Renaissance italienne", la maison dominant l'océan affiche un luxe époustouflant à l'intérieur et compte 70 pièces. Alice Vanderbilt voulait surpasser la somptueuse propriété voisine de sa belle-sœur, Marble House.


La demeure était également à la pointe de la modernité : le maître des lieux craignant les incendies demanda à l'architecte Richard Morris Hunt de la construire sans aucune structure en bois. La structure est également encadrée d'acier et de calcaire d'Indiana, réfractaire au feu, les chaudières enfouies sous terre à bonne distance de la maison. A l'intérieur, confort et modernité : téléphone, ascenseurs, éclairage et chauffage électrique, adduction d'eau douce et d'eau salée pompée dans l'océan... Dans les salles de bains, les baignoires de marbre étaient équipées de quatre robinets : deux pour l'eau douce chaude et froide, deux pour l'eau de mer, chaude et froide. Les occupants pouvaient ainsi prendre des bains de mer à domicile. 40 domestiques logeaient sur place, avec leur famille. Généreux, les Vanderbilt avaient mis à la disposition des serviteurs et de leurs enfants une plage privée. Des passages secrets furent creusés dans les murs et sous-sols pour que les serviteurs puissent aller et venir sans être vus et sans déranger leurs maîtres.

A l'intérieur, bibliothèque, salon de musique, salon de billard, salon du matin, ouvert sur l'océan, à l'est, pour pouvoir admirer le lever du soleil sur la mer...
Le hall d'entrée reste impressionnant, avec ses 14 mètres de haut et son plafond orné d'une peinture représentant le ciel. Il est bordé de chaque côté d'un salon de réception pour les hommes et d'un autre pour les femmes. Ce dernier est décoré de boiseries du XVIIIème siècle représentant la musique, l'astronomie, les arts... Au-dessus des portes des six salles donnant sur le hall, on trouve une sculpture représentant les arts, la science, l'industrie... Surplombant l'escalier, une vaste tapisserie flamande du XVIIème siècle rendant hommage à Alexandre le Grand. Sous l'escalier, ne manquez pas la petite fontaine...








La bibliothèque, au plafond à caissons, est ornée de boiseries en noyer du Caucase et d'une vaste cheminée amenée du Château d'Arnay-le-Duc en Bourgogne :





Le salon de musique n'a rien à envier à Versailles :





Il fût dessiné et monté en France avant d'être démonté et expédié sur place. Le maître de maison était doué pour le violon, son épouse pour le piano. Certains des murs sont décorés des paroles d'airs et chansons françaises célèbres de l'époque. La pièce servait également de salle de bal, une scène de bal de la série The Gilded Age y fût d'ailleurs tournée.



La salle à manger a une hauteur de deux étages pour une surface de 223 mètres carrés.
Le plafond est peint d'une fresque montrant "la déesse Aurore annonçant l'aube" et du plafond pendent deux chandeliers énormes composés de milliers de cristaux de Baccarat. Autour des murs, qui sont habillés de marbre de Cipollino, se dressent douze colonnes d'albâtre rose surmontées de bronze doré. Au-dessus des colonnes est installée une grande corniche dorée incrustée de masques, pendant que le plafond est incrusté d'urnes, de guirlandes, et de figurines sculptés en haut-relief. La cheminée, réplique d'une du règne de Louis XIII, est fabriquée de marbre gris, sculpté et doré, contre un fond de feuille d'argent. La table à manger date du XVIe siècle, faite de chêne marqueté de bois de citronnier. Elle peut accueillir 34 personnes. Sans doute la pièce la plus fastueuse de la demeure. Elle est prolongée d'une loggia donnant sur l'océan.







Le salon de billard est entièrement tapissé de marbres rares et polychromes :



Les chambres, on s'en doute, étaient de véritables appartements, pourvues de leur salle de bains privative avec marbre et mosaïques. Monsieur et Madame avaient chacun la leur. On en comptait 15 réservées à la famille (le couple, ses quatre fils et trois filles) et aux invités.






En 1934, à la mort de la maîtresse des lieux, sa fille Gladys hérite de sa fortune et de la propriété. En 1948, elle permet à la Société de Préservation de Newport d'offrir au public des visites du rez-de-chaussée. En échange, la société s'engage à payer les frais d'exploitation et d'entretien de la maison. La société achète finalement la propriété en 1972 et la maison devient un National Historic Landmark en 1994. Le parc est également "restauré" : la maîtresse des lieux y avait fait planter arbres et essences rares qui furent ravagés par un violent ouragan en 1938. Le but de la société de Préservation est donc de redonner au parc l'aspect qu'il avait en 1895, lorsque la demeure fût inaugurée par un bal somptueux.
The breakers se visite donc et attire les foules : environ 450 000 visiteurs par an. On y organise également séminaires, réceptions, mariages et tournages de films historiques.



Je vous proposerai prochainement un aperçu, pour poursuivre ce sujet, de Marble House, la maison "rivale" appartenant à la belle-sœur d'Alice Vanderbilt.
Nous parlerons aussi à cette occasion de l'incroyable bal organisé par Alva Vanderbilt, maîtresse des lieux. Bal qui coûta l'équivalent de six millions de dollars actuels et qui a inspiré un passage de la série The Gilded Age...

Je fuis, mais vraiment, très loin. Seule la bibliothèque pourrait me plaire vraiment. Et la loggia : clairement mon lieu préféré, bien plus épuré.

Tu vas fuir encore plus vite en découvrant :




Cette demeure fût construite par le même architecte qui construisît The Breakers, en 1888, pour le second frère Vanderbilt, William, et sa femme Alva. Comme on l'a vu plus haut, c'est pour rivaliser avec cette maison qu'Alice Vanderbilt, épouse de Cornélius Vanderbilt, fît édifier The Breakers.
L'extérieur reste assez classique et harmonieux, avec son fronton inspiré de celui de la Maison Blanche et sa façade inspirée du petit Trianon de Marie-Antoinette.




Par contre, à l'intérieur...















Bon là, clairement, ça fait saigner les yeux...
Mais bon, puisqu'on est là, on va visiter quand-même : la maison, en forme de U, comporte quatre étages et 50 pièces, avec les façades extérieures recouvertes de marbre blanc. L'entrée principale possède deux portes de style baroque français, chacune pesant une tonne et demie... 36 domestiques étaient au service du maître de maison et de Madame dans un ensemble de 14 000 mètres carrés de marbre qui a coûté l'équivalent de 260 millions de dollars actuels. Le marbre rose des murs de la salle à manger fût importé d'Algérie tandis que le grand salon, qui servait de salle de bal, a ses murs couverts de plaques d'or massif de 22 carats... Le plafond de la chambre de Madame était peint d'une fresque représentant la déesse Athéna.
La maison fût offerte à Alva Vanderbilt par son mari pour son 39ème anniversaire.

Le plus fou avec ces deux demeures, c'est qu'à l'époque, elles étaient considérées comme des "cottages", des "chalets", pour les weekends et les villégiatures d'été, au bord de l'océan. Le reste de l'année, les propriétaires résidaient en ville, dans leur non moins fastueux hôtel particulier.
A noter qu'Alva Vanderbilt fût une figure de proue du mouvement féministe aux USA. Elle soutînt fortement et financièrement de nombreuses associations féministes et milita activement pour le droit de vote des femmes. Elle est restée également célèbre pour avoir donné en 1883 un des plus fastueux bals costumés de l'histoire, qui coûta l'équivalent de six millions de dollars actuels pour une seule soirée.


En 1895, après 20 ans de mariage, Alva Vanderbilt divorce. Elle épouse un autre millionnaire l'année suivante et garde Marble House mais n'y vit plus. Devenue veuve, elle rouvre la maison et s'y installe jusqu'en 1919. A cette date, elle quitte les USA pour partir s'installer en France, afin de se rapprocher de sa fille, partageant son temps entre Paris, la Côte d'Azur et le château d'Augerville, qu'elle fait entièrement restaurer. Elle vend la maison en 1932, un an avant sa mort et la demeure est rachetée en 1963 par une fondation avant d'être classée monument historique.
Comme sa rivale The Breakers, Marble House se visite et on y organise réceptions, séminaires, mariages et tournages de films et séries historiques, dont par exemple The great Gatsby en 1974 avec Faye Dunaway et Robert Redford ou encore Amistad, en 2008.

A sauver de cette débauche de dorures, de clinquant et de marbre :









Un pavillon de thé qu'Alva fît construire dans le parc, face à l'océan, lorsqu'elle revînt habiter à Marble House après son veuvage.
C'est là qu'elle recevait ses amies féministes et y organisait leurs réunions.

L'extérieur ça passait plutôt bien, j'étais encore confiant... Le salon gothique, j'aime bien le concept et j'aime beaucoup les vitraux en général... Les cheminées aussi, mais pas celle-là. Et le plafond est surchargé à mort.
Le pavillon chinois, franchement pourquoi pas si c'est réalisé avec authenticité. Mais si ça lorgne du côté de Las Vegas, alors non.

Pour répondre à ta question, voici l'intérieur du pavillon chinois :



Comme la maison, il sert aujourd'hui de salle de réception pour mariages, séminaires, réunions...