LA CHAPELLE DES OS (Portugal)

Nous voici au Portugal, plus précisément dans la ville d'Evora.
C'est ici que se trouve un des monuments les plus étranges du pays, inséré dans l'église saint-François : Capela dos Ossos, la chapelle des os ou chapelle des ossements :







Tout commence au XVIème siècle lorsqu'en raison de l'épidémie de peste qui fait rage, les 42 cimetières de la ville ne suffisent plus à accueillir les défunts et débordent, littéralement. Les moines ont alors l'idée de récupérer les ossements en trop pour en orner les murs d'une nouvelle chapelle, édifiée là où se tenait leur dortoir. Outre l'aspect pratique (désengorger les cimetières tout en donnant une sépulture aux défunts), l'idée est de s'interroger sur la brièveté et la fragilité de la vie. En témoignent ces mots, inscrits à l'entrée du sanctuaire : " Nós ossos que aqui estamos pelos vossos esperamos (Nous, les os ici présents, attendons que les vôtres nous rejoignent) ".



Trois nefs dont les murs et les huit colonnes sont couverts de crânes et d'ossements humains... Au total, ce sont environ 5000 squelettes qui reposent ici. Le plafond est orné de motifs funèbres et de deux cadavres (dont celui d'un enfant) desséchés pendus par des chaînes... Melior est dies mortis die nativitatis (« Le jour de la mort vaut mieux que celui de la naissance ») est-il inscrit à proximité.



Les ossements des moines ayant édifié la chapelle sont eux préservés dans de petits coffres blancs (les ossuaires) :



Inscrite au Patrimoine Mondial de l'Humanité, une chapelle plutôt inattendue. Un peu sinistre quand-même... Mais elle se visite, si le coeur vous en dit. Attention, si l'église est en accès libre, l'accès à la chapelle est payant.

A noter que ce genre de chapelle des ossements n'est pas unique au Portugal, on en compte six en tout dont :

Je comprends que ça puisse rebuter.
Après, je pense qu'il faut aussi se mettre dans le contexte de l'époque : la peste faisait des ravages, les gens mourraient par centaines, hommes, femmes, enfants, vieillards... La mort était partout, l'avenir était très sombre... Dans un tel contexte, on peut comprendre cette notion de brièveté et de fragilité de la vie exprimée ici. Pour ceux qui croyaient à autre chose après, nul doute que dans de telles conditions, cet après soit apparu finalement meilleur que cette vie.
Et puis, il y avait l'aspect pratique : les cimetières dégorgeaient leurs cadavres, c'était un moyen de donner une sépulture, un peu spéciale certes mais dans un lieu consacré, à ces défunts.

Après, d'accord, c'est plutôt sinistre.

Je comprends bien les réticences, mais c'est assez fou quand même. Il y a de quoi enflammer l'imaginaire des gothiques. Sauf que là, la réalité dépasse la fiction. Je suis assez surpris de ne pas être tombé sur une référence à ce lieu avant.

Perso, même si je trouve ça plutôt sinistre, ça ne me dérange pas. Je n'irai certes pas intentionnellement la visiter mais si l'occasion s'en présentait, pourquoi pas.
La seule chose qui me gêne, ce sont les deux cadavres desséchés pendus au plafond, dont celui d'un gosse quand-même. Je n'ai pas encore trouvé la raison de leur présence dans cette chapelle.

Pour rester dans l'ambiance, vous pouvez également visiter :




Une chapelle mortuaire décorée avec les crânes et ossements de 40 000 défunts...
Situé dans la chapelle funéraire d'une église de Sedlec, l’ossuaire date du treizième siècle. A l'époque, un religieux part en pèlerinage en Terre Sainte et en rapporte de la terre sacrée qu'il répand dans le cimetière de l'église. On se bouscule alors, si j'ose dire, pour y être enterré le moment venu. En 1348, 30 000 victimes de la peste noire y furent inhumées. Plus tard, une partie du cimetière est supprimée et les os alors entreposés dans la chapelle. C'est finalement au début du XVIIIème siècle que les ossements d’environ 40 000 personnes furent utilisés pour orner la chapelle. On a même constitué des croix et des calices avec des os de hanches et de fémurs.

Les ossements sont alors entassés sous forme d'immenses pyramides :





La chapelle a été restaurée en 1870 par le sculpteur František Rint de Česká Skalice, sur demande des princes Schwarzenberg de Worlik. Chaque os, chaque crâne a été nettoyé, désinfecté et blanchi grâce à une solution spéciale à base de citron. Des guirlandes de crânes et d'ossements ornent alors chandeliers, lustres et arcades. Le grand chandelier est lui constitué de chaque os du corps humain d'après la légende. Pour remercier ses commanditaires, l'artiste a reconstitué leur blason avec certains des ossements :



Intéressés ? L'endroit se situe à Kutna Hora, à 70 kilomètres de Prague. Petites maisons, ruelles pavées pittoresques, églises baroques et donc, l'ossuaire de Sedlec. Ce dernier se trouve dans le sous-sol de la chapelle funéraire de l'église de Tous les Saints. L'ossuaire se visite mais attention : une campagne de restauration a été entreprise, prévue pour durer jusqu'en 2030. Du coup, certains des ossements sont déplacés (avec tout le respect qui leur est dû) ou rendus inaccessibles. se renseigner avant. Beaucoup de monde : l'endroit est la deuxième destination touristique du pays après Prague. Vous avez dit gothique ?

C'est vraiment étonnant. Le coup du chandelier ou du corbeau : c'est fou. Excellente découverte.

On peut quand-même considérer comme discutable, niveau goût, les guirlandes de crânes ornant les voûtes je trouve...
Pour le chandelier et le blason, ils posent tout de même une sérieuse question. Car ces œuvres d'art sont quand-même réalisées avec des os humains... Avec les restes de défunts. Que l'on entasse des ossements parce qu'on n'a pas d'autres possibilités de sépulture, d'accord. Mais peut-on faire de l'art avec les restes de défunts ? Sujet complexe.