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Sujet: MICHEL STROGOFF (Jules Verne) Mar 21 Nov - 20:10
C'est en 1876, suite à la visite du Tzar Alexandre II à Paris que Jules Verne décide d'écrire ce grand roman d'aventures qui se déroule dans les steppes enneigées de la Russie des Tzars. Une Russie encore mystérieuse, mal connue, propre à l'imaginaire et au dépaysement. Le roman paraît d'abord en feuilleton dans un journal, comme c'était souvent le cas à l'époque. Il est finalement édité sous forme de roman la même année.
Voici donc Michel Strogoff, "courrier" du Tzar, chargé par ce dernier d'un long et dangereux périple à travers steppes et taïgas, entre Moscou et Irkoutsk, en Sibérie Orientale. Strogoff doit informer le frère du Tzar de l'invasion imminente des hordes Tartares, menées par un traître, les communications habituelles étant coupées. On l'imagine, notre valeureux courrier va connaître de multiples épreuves, tant naturelles qu'humaines (il aura même les yeux brûlés et deviendra aveugle), il va rencontrer beaucoup de monde dont la belle Nadia qui restera une amie fidèle, au point que ces deux là se font passer pour frère et sœur.
Dépaysement total. On a tous les ingrédients, jusqu'aux clichés parfois, de la Russie "éternelle" : les immensités glacées, les steppes enneigées, les forêts et taïgas, le train à vapeur, les hordes bigarrées à cheval et les pillards en cuir et fourrure, fusil au poing et coutelas au côté, les fastes des Tzars, les églises baroques aux bulbes dorés et les monastères de bois perdus sous la neige... Mais aussi du romanesque, de l'aventure, des drames et du dépaysement... Un grand bol d'air, un immense espace, une aventure haletante bourrée de périls... Rien d'étonnant à ce que Michel Strogoff ait fait école et inspiré le cinéma et la TV.
Après, le style de Jules Verne peut rebuter. Un style assez académique et scolaire parfois, beaucoup de noms, de localités, de références géographiques et ethniques qui peuvent plomber le récit. L'ensemble est assez manichéen aussi, attendu même avec la belle et pure Nadia, blanche comme neige, des méchants vraiment très méchants et un héros dont on sait qu'il va s'en sortir au final, forcément. Mais bon, c'était l'époque aussi. Malgré tout, ma relecture, bien des années plus tard, m'a beaucoup moins transporté qu'avant et j'ai trouvé que ça avait vieilli. Je pense que regarder les films ou les séries TV (j'y reviendrai car certaines sont bien) peut aider à visualiser tout ça, mieux que les descriptions un peu sèches et le style du livre.
Gorak
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Sujet: Re: MICHEL STROGOFF (Jules Verne) Mar 21 Nov - 21:11
Voyageur Solitaire a écrit:
Un style assez académique et scolaire parfois, beaucoup de noms, de localités, de références géographiques et ethniques qui peuvent plomber le récit.
C'est normal : Jules Verne écrivait d'après journaux et revues, il se documentait d'après les récits des autres, lui-même ayant très peu voyagé. Et puis, c'est le milieu du XIXe siècle : une époque où l'on mettait la science et les techniques à l'honneur. Les sociétés de géographie étaient très à la mode ; elles avaient un but pédagogique mais aussi, avouons-le, un but parfois très politique puisqu'elle servait la conquête coloniale.
En tout cas, n'hésite pas à "sauter" les longueurs. C'est ce que je fais. Quand les noms, les références et les données s'enchaînent et ralentissent la lecture, je me porte directement au bout du paragraphe et je reprends le récit de l'aventure.
Personnellement, "Michel Strogoff" n'est pas l'aventure de Jules Verne qui m'a le plus emballé. Même quand j'étais plus jeune. Surtout après que j'ai découvert les "Cosaques" de Tolstoï. Quand j'étais petit, je préférais "20 000 lieues sous les mers" ou le "Voyage au Centre de la Terre" que j'ai dévoré en une nuit (à la lampe-torche sous les draps) et bien entendu "Cinq Semaines en Ballon".
VIC
Messages : 4285 Date d'inscription : 18/01/2012
Sujet: Re: MICHEL STROGOFF (Jules Verne) Mar 21 Nov - 23:36
Tiens c'est une bonne idée. Ce devrait me faire du bien de tenter de le lire en décembre. Aller, je vais tâcher de trouver du temps pour le lire et vous livrer mes impressions avant la fin de l'année.
VIC
Messages : 4285 Date d'inscription : 18/01/2012
Sujet: Re: MICHEL STROGOFF (Jules Verne) Sam 9 Mai - 11:17
Pas le meilleur Verne en ce qui me concerne, et je vais dire pourquoi. Vous l'avez déjà dit, un style académique un peu trop descriptif, habituel chez Verne, moins marqué que dans d'autres toutefois, comme dans 20000 lieues sous les mers où l'on avait droit à l'inventaire en règle de la faune sous marine). Manichéisme et stéréotypes effectivement, comme dans les autre Verne, c'est l'époque en effet. Jusqu'ici, il ne se démarque pas autres.
Mais alors, qu'est qui m'a gêné dans ce road movie ?
Et bien l'idée de base est bancale : en quoi un courrier du Tsar est essentiel pour prévenir d'une guerre, même sans télégraphe ? Strogoff va croiser plusieurs fois des gens qui l'ont devancé et ont naturellement prévenu les autorités de la guerre. Bref, sa mission ne sert à rien. Certes il pourrait y avoir des informations vitales et uniques dans le courrier qu'il transporte, mais je n'ai pas eu cette impression. Si la mission est inutile et caduque, cela plombe carrément le livre.
Deuxième reproche : le coup de son aveuglement, très intéressant (et violent pour l'époque), passage le plus marquant du livre et propre à frapper les esprits, est effacé par une pirouette ridicule que je ne dévoile pas. Verne est un peu fumiste sur ce coup là avec une explication farfelue absolument pas crédible scientifiquement. En réalité, cela tiendrait plus du miracle qu'autre chose, ce qui aurait été rendu possible à la rigueur dans une Russie très croyante s'il avait choisi d'en faire un roman mystique.
Troisième reproche, le moindre, celui des coïncidences avec les adversaires qu'il croise dans les villes, les conversations épiées, etc. C'est un peu gros comme ficelle. Je note aussi que le duo de reporters n'apporte rien pour moi à l'histoire, je me demande ce qu'ils viennent faire dans cette galère.
Bref, trop d'incohérences pour en faire un bon Verne d'après mes critères.
Sujet: Re: MICHEL STROGOFF (Jules Verne) Sam 9 Mai - 20:05
VIC a écrit:
Deuxième reproche : le coup de son aveuglement, très intéressant (et violent pour l'époque), passage le plus marquant du livre et propre à frapper les esprits, est effacé par une pirouette ridicule que je ne dévoile pas. Verne est un peu fumiste sur ce coup là avec une explication farfelue absolument pas crédible scientifiquement. En réalité, cela tiendrait plus du miracle qu'autre chose, ce qui aurait été rendu possible à la rigueur dans une Russie très croyante s'il avait choisi d'en faire un roman mystique.
Troisième reproche, le moindre, celui des coïncidences avec les adversaires qu'il croise dans les villes, les conversations épiées, etc. C'est un peu gros comme ficelle. Je note aussi que le duo de reporters n'apporte rien pour moi à l'histoire, je me demande ce qu'ils viennent faire dans cette galère.
Bref, trop d'incohérences pour en faire un bon Verne d'après mes critères.
Le feuilleton de 1975 de Claude Desailly s'est permis quelques libertés avec le récit de Jules Verne.
Spoiler:
Féofar Khan fait semblant d'ôter la vue à Michel Strogoff. Il veut en faire un allié éventuel contre Ogareff. On ne sait cependant pas pourquoi Michel Strogoff est relâché dans la nature juste après qu'on eut fait semblant de l'aveugler.
Alcide Jolivet et Harry Blount se révèlent au dernier épisode être deux espions à la solde de la France et de la Grande-Bretagne respectivement.
Astre*Solitaire
Messages : 2377 Date d'inscription : 09/12/2012
Sujet: Re: MICHEL STROGOFF (Jules Verne) Dim 10 Mai - 14:43
Pas lu depuis très très longtemps. À l'âge où je l'avais lu - 15/20 ans - le retournement de situation finale m'avait bluffé. Je pense que c'est un peu un problème habituel de vouloir faire en sorte que tout soit toujours crédible, réaliste, probable. Bien qu'il ne faille évidemment pas en abuser, c'est bien souvent ce genre de mécanisme qui confère un certain sel à l'aventure ou l'histoire. Par contre pour les reproches 1 et 3, j'aurais tendance à te suivre car il s'agit là fondamentalement d'un soucis de construction de scénario qui renvoie à une certaine paresse de l'auteur (ou précipitation pour des délais trop courts).
Je me rappelle avoir vu ce feuilleton (en rediffusion) qui avait contribué à mon intérêt pour ce Jules Verne qui fut l'un des premiers que je lus.
_________________ Goburlicheur de chrastymèles
VIC
Messages : 4285 Date d'inscription : 18/01/2012
Sujet: Re: MICHEL STROGOFF (Jules Verne) Lun 11 Mai - 7:53
Sphigx a écrit:
Le feuilleton de 1975 de Claude Desailly s'est permis quelques libertés avec le récit de Jules Verne.
Spoiler:
Féofar Khan fait semblant d'ôter la vue à Michel Strogoff. Il veut en faire un allié éventuel contre Ogareff. On ne sait cependant pas pourquoi Michel Strogoff est relâché dans la nature juste après qu'on eut fait semblant de l'aveugler.
Alcide Jolivet et Harry Blount se révèlent au dernier épisode être deux espions à la solde de la France et de la Grande-Bretagne respectivement.
Merci Sphigx pour ces informations en spoiler. Je trouve ces libertés pertinentes :
Spoiler:
Féofar Khan devient plus ambigu, rendant l'histoire plus adulte et moins manichéenne, de même que les deux espions.
Astre*Solitaire a écrit:
Je me rappelle avoir vu ce feuilleton (en rediffusion) ...[/justify]
J'ai du le voir une fois au début des années 80, je n'avais pas lu le livre à l'époque. Je ne me souviens que de la scène de l'aveuglement, et de scènes de souffrances dans la neige.
Sujet: Re: MICHEL STROGOFF (Jules Verne) Mar 12 Mai - 7:07
Voyageur Solitaire a écrit:
Après, le style de Jules Verne peut rebuter. Un style assez académique et scolaire parfois, beaucoup de noms, de localités, de références géographiques et ethniques qui peuvent plomber le récit.
Quand j'étais dans le transsibérien, j'étais content quand je traversais une localité que Michel Strogoff avait traversée: Perm, Ekaterinbourg, Omsk, Tomsk, Krasnoïarsk et Irkoutsk. Novossibirsk n'existait pas en 1876. Je fus déçu quand je remarquai que la ligne ne passait pas à côté du lac Tchany, mais à trente kilomètres au nord.