LE PAVOT

C'est la fleur "d'ombre et de lumière", à la fois bénéfique et néfaste.
Le pavot, grande fleur solitaire trés colorée, donne par incision de son bulbe une gomme blanche : l'opium. Cette substance sera rapidement utilisée pour soulager et atténuer la douleur. On l'utilisait en sirop et en grains principalement, elle calmait et provoquait une légère somnolence. Les summériens l'utilisaient déjà 3000 ans av JC !
Puis c'est la mise au point de la "teinture d'opium", c'est à dire le laudanum, qui devient un puissant calmant, aux effets sédatifs et analgésiques.
Et c'est enfin, au début du XIXème siècle (en 1804), la mise au point de la morphine (de Morphée, le dieu grec du sommeil et des rêves) qui reste à ce jour la référence pour le soulagement et l'apaisement de la douleur. Il faudra encore attendre 1850 et l'invention de la seringue à aiguille creuse par le lyonnais Charles Pravaz pour qu'elle devienne d'un usage courant. La morphine est alors utilisée massivement sur tous les champs de bataille, notamment pendant la Guerre de Sécession. C'est à cette occasion que l'on se rend compte qu'elle peut créer une dépendance et devenir une drogue. L'opium quitte alors le domaine médical pour entrer dans celui des narcotiques : des fumeries d'opium plus ou moins clandestines ouvrent alors et on assistera même à la fameuse "Guerre de l'opium". Un excès de morphine a pour symptômes l'apparition d'un état de somnolence, d'hypothermie et d'hypotension, et rapidement une dépression respiratoire (difficulté à respirer) pouvant entraîner le coma et la mort.
C'est également de l'opium qu'est issue l'héroïne.
L'opium est donc à la fois bénéfique et redoutable. A la base de tout celà, il y a une grande fleur solitaire à quatre pétales satinés qui prend si bien la lumière...

Aussi surprenant que cela puisse paraître, l'héroïne n'a pas toujours été considérée comme un produit stupéfiant, bien au contraire même, puisqu'il était prescrit pour soigner la toux !

En 1897, son créateur, le chimiste allemand Heinrich Dreser, qui travaillait pour le laboratoire pharmaceutique Bayer, créa aussi l'aspirine mais trouvait cette dernière moins efficace. D'après ses notes, il craignait en effet que l'aspirine soit contre-productive à cause d'un effet "affaiblissant" sur le coeur. En revanche, l'autre substance, qu'il testait sur lui-même et ses collègues, avait un effet "héroïque".

Sans plus de tests, le médicament est aussitôt commercialisé en novembre 1898 sous le nom d'Héroïne. La publicité le vante comme dix fois plus efficace contre le rhume que la codéine et proclame qu'elle combat mieux la douleur que la morphine. Bref, c'est le remède miracle de l'époque.

Au bout d'un an, on trouve de l'héroïne dans toutes sortes d'élixirs médicinaux : pilules, pastilles contre la toux, comprimés effervescents. Elle est particulièrement populaire aux Etats-Unis. Une publication médicale qui fait autorité à Boston la décrit en 1900 comme offrant "des avantages multiples par rapport à la morphine. Pas d'effet hypnotique, pas de danger d'accoutumance." Six ans plus tard, pas moins de 120 études cliniques furent publiées dans le monde, presque toutes rendaient un avis favorable.

Cependant, quelques rapports commencent à affluer sur des patients devenus "insensibles" au nouveau produit, qui réclament des doses de plus en plus fortes. Il faut attendre 1913 pour que Bayer cesse de l'utiliser dans ses médicaments. Entre-temps, les hôpitaux américains ont vu arriver une foule de patients souffrant d'un nouveau phénomène d'addiction de masse... hallucinant.

Et l'on faisait des piqûres d'héroïne à l'Impératrice Elisabeth d'Autriche pour lutter contre ses maux de tête... c'est fascinant, de mon point de vue. Comme le laudanum que l'on prescrivait à tour de bras, au XIXè siècle.

Concernant le Pavot, c'est une fleur que j'aime beaucoup. Elle m'évoque le monde du Sommeil et de la Nuit, du Rêve ; de l'illusion aussi, peut-être.

Elle évoque aussi Baudelaire et Théophile Gautier qui prenaient très souvent l'habitude de fumer de l'opium et de laisser ensuite errer leur esprit.

Oui ! Il y a cette idée de voyage intérieur, idée que j'aime beaucoup.

J'ai deux ou trois pavots dans mon jardin, si si...
Cet été je les ai vus fleurir : très délicat et transparent, avec une très belle couleur qui avait plusieurs teintes en dégradé.

Oh ! Si quelques fleurs viennent à manquer, c'est que je suis passée par là ! (Comment ? Ce sera un secret. )