Mikalojus Konstantinas Ciurlionis, né le 22 septembre 1875 à Senoji Varena (district de Varena, sud de la Lituanie) et mort le 10 avril 1911 à Pustelnik (arrondissement de Marki près de Varsovie, en Pologne), est un compositeur et peintre lituanien.
A la fois l’un des fondateurs de l’école musicale lituanienne et un peintre de la plus grande originalité qui a incarné le lien entre les symbolisme et l’art abstrait, il a vécu une existence brève, désorganisée et besogneuse qui s’est achevée, comme celle de Mozart, au milieu de sa trente-sixième année. Devenu depuis le véritable symbole de l’identité nationale lituanienne, il reste presque totalement ignoré en dehors de son pays, tout en ayant suscité l’admiration de personnalités aussi diverses que Romain Rolland, Jean-Paul Sartre et Olivier Messiaen.
Né la même année que Maurice Ravel, il reçoit de son père, organiste de paroisse, les bases de la formation musicale. Il étudie entre 1894 et 1899 en classes de piano et de composition au Conservatoire de Varsovie. De ces années datent de nombreuses compositions pour piano (fugues, variations, deux sonates), un thème avec variations et fugue pour quatuor à cordes, plusieurs pièces chorales et surtout son œuvre de fin d’études, composée au printemps 1899, la cantate De Profundis pour chœur et orchestre. En 1900-1901 il écrit son premier poème symphonique Dans la Forêt. À partir de 1901, il poursuit sa formation en classe de composition avec Carl Reinecke au Conservatoire de Leipzig (Allemagne), ville où il enrichit sa culture générale (qui est très universelle puisqu’il s’intéresse également, jusqu’à la fin de sa vie, à l’astrologie, la chimie, l’histoire, la philosophie...). Puis il revient à Varsovie et y intègre en 1904 l’École des Beaux-Arts, désirant également se consacrer à la peinture. Suivent plusieurs années – agrémentées de voyages en Allemagne et en Autriche durant lesquels il parfait son éducation artistique – où il mène conjointement une double carrière de compositeur et de peintre (avant que cette dernière ne prenne plutôt le dessus). En 1906, il visite Prague, Dresde, Nuremberg, Munich où il découvre notamment Max Klinger, puis revient par Vienne où il est séduit par les expositions d’art et d’industrie, les églises baroques. À Varsovie, il dirige un temps un chœur lituanien établi dans cette ville et pour lequel il écrit plusieurs œuvres chorales a cappella (notamment des harmonisations de chants populaires). Entre 1903 et 1907 il compose son œuvre majeure, le poème symphonique La Mer. En même temps, ses premiers tableaux sont exposés en 1905 à Varsovie, puis l’année suivante à Saint Pétersbourg et à Vilnus, où il s’installe à partir de 1907. Il y devient un des chantres de l’identité nationaleprenant part à tous les évènements artistiques de la ville. Il y compose son opéra Jurata, harmonise les chants populaires lituaniens, organise des soirées musicales à la « Société d’Art international et lituanienne ». C’est à Vilnius que furent créés ses meilleurs tableaux, appelés "Sonate", “Andante”, “Adagio”, “Allegro”, “Fugue”, etc. Peu à peu, la peinture va ravir la première place à la musique dans la vie créatrice de Ciurlionis... pour les quelques années qui lui restent à vivre. Malheureusement ses compatriotes sont indifférents à ses créations et il reste incompris et solitaire dans ses aspirations. En 1908, il va à Saint Pétersbourg, où Doboujinski, Roerich, Bilibine, Alexandre Benois et tout le groupe du Mir Iskousstva (Le Monde de l’Art) groupé autour de Diaghilev lui fait un accueil chaleureux. Kandinsky, également, s’intéresse à lui. Sa vie matérielle cependant ne s’améliore guère. Marié en 1909 à Sophie Kimantajte, il ressent bientôt les premières atteintes de la maladie psychique qui assombrira la fin de sa vie. Il meurt, inconscient, le 10 avril 1911. Aussitôt un regain d’intérêt se manifeste envers lui : expositions, articles, concert de ses œuvres au Conservatoire de Saint Pétersbourg, numéro spécial de la revue d’art “Apollon” que dirige le critique Serguci Makovski.
En musique, il est l’auteur de quelque 300 compositions dans des domaines variés (piano — dont de nombreux préludes et fugues —, orgue, musique de chambre, orchestre, chœurs...), l’une de ses plus connues étant le poème symphonique La Mer (1903-1907), sans doute son œuvre majeure (contemporaine du triptyque pour orchestre composé sous le même titre en 1905 par Claude Debussy). Dans la forêt, également un poème symphonique (1900-1901), le quatuor à cordes en ut mineur (1901-1902) et un cycle pour piano lui-aussi nommé La Mer (1908) sont trois autres de ses compositions majeures.
Voir ici le sujet musiqueEn peinture, Ciurlionis crée environ 300 tableaux, dans la mouvance du symbolisme et de l’Art nouveau, dont un triptyque abordant le thème de la mer une fois de plus, sa Sonate de la mer de 1908, comprenant trois mouvements intitulés Allegro, Andante et Finale. Il compose d’ailleurs souvent des « suites » de tableaux dont les titres font régulièrement référence à la musique, notamment d’autres « sonates », comme la Sonate du soleil de 1907, en quatre tableaux. Il réalise aussi des « cycles » ambitieux, tels La Création du Monde, cycle de treize tableaux de 1905-1906 ou Le Zodiaque, cycle de douze tableaux de 1907 et, en outre, nombre de tableaux et dessins isolés, dont trois Contes de fées de 1908-1909, ainsi que Les Croix de Samogitie et Rex, deux de ses dernières toiles, de 1909.
En 1911, la revue Apollon lui consacre un article dans son numéro 5, sous la plume de son créateur Sergueï Makovski. C’est en partie grâce à cet article élogieux et aux soutiens qui en résultèrent que ce musicien et peintre a retrouvé sa place de précurseur de l’art moderne, aujourd’hui encore méconnue. En 1912, Mir Iskousstva organise une exposition posthume de 125 toiles groupées en différents cycles : des paysages fantastiques, un univers originel irréel. Ciurlionis avait été, jusque là, le seul à oser incarner ses rêves sur la Création du monde dans sa peinture à la limite du figuratif et de l’abstrait.
La Création du Monde I
La Création du Monde II
La Création du Monde III
La Création du Monde IV
La Création du Monde V
La Création du Monde VI
La Création du Monde VII
La Création du Monde VIII
La Création du Monde IX
La Création du Monde X
La Création du Monde XI
La Création du Monde XII
La Création du Monde XIII